Qu'est-ce que le risque ?
Dans le langage courant, le mot « risque » désigne un danger, un inconvénient plus ou moins prévisible. En droit, le risque est un événement dont la survenance est incertaine quant à sa réalisation ou à la date de cette réalisation susceptible de causer un dommage aux personnes et/ou aux biens.
Au cours de ces dernières années, la notion de risque a beaucoup évolué, sa perception aussi. Deux grandes tendances sont perceptibles : l'apparition de nouveaux risques et la baisse du niveau d'acceptation du risque
- L'apparition de nouveaux risques : risques dus au progrès des techniques et des sciences ; à l’urbanisation massive et ses effets ; à la multiplication des déplacements et ses conséquences. Ce sont, le plus souvent, des risques diffus (l'identification du responsable du dommage est difficile à établir) et sériels (risques de masse qui se propagent rapidement).
- La baisse du niveau d'acceptation du risque : si les risques ont évolué, la perception que nous en avons a aussi beaucoup changé. La notion de risque acceptable s’est transformée et le seuil de tolérance aux risques a baissé d’où le développement du droit à indemnisation. Tout risque doit aujourd’hui être attribué à un responsable.
Cette transformation de la notion de risque s’est accompagnée d’une transformation de sa prise en charge. D’une part, la responsabilité individuelle fondée sur la faute va laisser peu à peu la place à une responsabilité sans faute fondée sur le risque. D’autre part, à côté du mécanisme traditionnel de la responsabilité, le législateur a imaginé de nouveaux dispositifs de collectivisation par les assurances et par les fonds de garanties.
Qu’est-ce que la responsabilité individuelle fondée sur la faute ?
D’après le Code Civil (1804), la responsabilité est individuelle ou subjective. Elle se définit comme l'obligation de répondre devant la justice d'un dommage et d'en réparer les conséquences en indemnisant la victime. Le fondement est la faute (article 1382 du Code Civil), voire la négligence ou l’imprudence (article 1383). L'auteur d'un dommage doit en répondre chaque fois qu'il est en faute mais il n'en répond qu'à cette condition. On est également responsable des personnes dont on doit répondre et des choses que l'on a sous sa garde (art. 1384 Code civil).
L'indemnisation du préjudice causé à la victime est liée à la responsabilité individuelle de l'auteur du dommage. Celui-ci répondait de ses biens propres pour indemniser la victime. La victime doit prouver la faute de l'auteur du dommage pour pouvoir obtenir une indemnisation.
Vers la fin du XIXe siècle, la responsabilité civile fondée sur la faute s'est avérée insuffisamment protectrice des victimes. L'apparition du machinisme, le développement des moyens de transport, ont rendu les dommages plus graves et plus nombreux. Il est devenu plus difficile de déterminer si ces dommages étaient dus ou non à une faute. Tout ceci a conduit le droit de la responsabilité à évoluer et à retenir, à coté de la faute, un nouveau fondement : le risque.
Qu’est-ce que la responsabilité individuelle fondée sur le risque?
La fin du XIXème siècle et le XXème siècle marquent le recul de la responsabilité fondée sur la faute et l'avènement de la responsabilité fondée sur le risque. Toute activité faisant naître un risque pour autrui rend son auteur responsable du préjudice qu'elle peut causer, sans qu'il ait à prouver une faute à son origine. On parle de responsabilité objective. Elle fait supporter aux individus la responsabilité des risques qu'ils génèrent pour autrui en raison des activités qu'ils pratiquent. La victime est automatiquement indemnisée sans avoir à prouver la faute de l'auteur du dommage. Cependant, la faute est souvent prise en compte pour diminuer ou augmenter l'indemnisation. L'apparition du risque comme nouveau fondement de la responsabilité a coïncidé avec le développement de la technique de l'assurance.
On assiste aujourd'hui à une collectivisation du risque et au déclin de la responsabilité individuelle dans sa fonction d'indemnisation. Que l’auteur du dommage soit solvable ou non, qu’il soit connu ou non, ses victimes sont ainsi certaines d’être indemnisées. La collectivisation du risque prend deux formes : la mutualisation et la socialisation.
Qu’est-ce que la mutualisation du risque ?
Mutualiser un risque consiste à le répartir à égalité parmi les membres d'un groupe homogène (une mutualité). Pour être assuré le risque doit revêtir quatre caractères : être futur, être incertain, ne pas dépendre totalement de la volonté de l'assuré et qu’il ne survienne pas au même moment pour tous les assurés. L'assureur organise la solidarité entre les assurés : les sinistres de certains sont financés par les primes ou les cotisations de tous. L'objectif est de diminuer le coût d'indemnisation pour l'auteur du dommage et assurer une indemnisation de la victime. L’assureur peut être une organisation publique ou privée. L'assurance publique est le fondement de la Sécurité Sociale qui couvre les risques maladie, maternité, décès, accidents de travail… L'assurance privée est assurée par les compagnies d’assurance et les mutuelles.
Qu’est-ce que la socialisation du risque ?
Les assureurs privés ne peuvent ou ne souhaitent pas couvrir certains risques. C'est le cas lorsque l'identification du responsable est difficile et le coût d'indemnisation est prohibitif. Pour pallier la non-intervention des assureurs, la loi intervient pour socialiser le risque.
La socialisation du risque consiste à le faire prendre en charge par la société en impliquant l'Etat par le biais des fonds de garantie. Il s'agit d'organismes dotés de la personnalité morale qui permettent d’indemniser les victimes lorsque l’auteur d’un accident est inconnu ou insolvable, lorsqu’une société d’assurances est mise en liquidation ou lorsque les coûts de l’indemnisation sont trop lourds à supporter. Exemples : le fonds d'indemnisation des accidents médicaux, le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le fonds d'indemnisation des personnes atteintes par la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
Les fonds de garantie engagent un recours subrogatoire (à la place de la victime) contre le responsable fautif. Des sanctions pénales sont prévues pour certains sinistres afin d'éviter de déresponsabiliser l'auteur du préjudice.
Ces fonds sont financés par divers moyens : l’impôt, des cotisations versées par les victimes potentielles et des cotisations versées par ceux qui contribuent à créer le risque.